Salvatore « Lucky » Lucania purge une peine de cinquante ans de prison pour proxénétisme lorsqu’il est libéré pour services rendus à l’armée américaine. En 1946, il part pour Naples, où il mène une vie paisible, entre sa femme et son chien. Sans emploi, il rencontre ses amis aux courses ou dans les cafés. Pourtant, certains indices laissent supposer qu’il est à la tête d’un important trafic mondial de drogue et d’armes.

« Le film de Rosi se présente, de toute évidence, comme une enquête sur le pouvoir. À partir de la figure énigmatique de Lucky Luciano, chef présumé de la Mafia, s’ébauchent les rapports, les influences, les pressions qui s’opèrent entre le pouvoir légal et le pouvoir “illégal” d’une part, entre les différentes nations de l’autre (Amérique et Italie en particulier) et même, au sein de chaque pays, entre différents groupes d’opinion (démocrates et républicains aux USA, partis politiques en Italie…). Et toujours la Mafia impose sa présence au centre de chacune de ces luttes. Elle ne constitue plus un pouvoir secret et honteux mais, pour reprendre les propres termes de Rosi, une sous-classe bien structurée, un sous-pouvoir qui garantit sa respectabilité et qui est donc toujours et par définition du côté de l’ordre. La Mafia n’est plus hors-la-loi. Elle est dans-la-loi. Et c’est précisément cette intégration tranquille à la norme politique que raconte Lucky Luciano. »

Frédéric Vitoux, Positif no 155, janvier 1974