Blues People
Un film de Skip Norman
D’une part, une forme d’art qui a émergé au sein de la population afro-américaine opprimée à la fin du XIXe et au début du XXe siècle – le blues. D’autre part, le mythe sexuel, qui a contribué à la suppression des relations sexuelles entre « Noirs » et « Blancs » – mais surtout entre hommes noirs et femmes blanches. Deux aspects de la structure sociale de l’Amérique.
« Le film le plus fort, non seulement du programme allemand mais aussi du festival en général, a été pour moi Blues People de Skip Norman. L’Américain, qui étudie à l’Académie allemande du cinéma et de la télévision (DFFB), a réussi quelque chose que même de grands cinéastes comme Murnau ou Eisenstein n’ont réussi qu’en de rares occasions. Norman oppose des contradictions, non pas pour les annuler ou les réconcilier, mais pour rendre sensuellement et concrètement palpable une injustice ancestrale et une grande discorde. Le son et les paroles du blues mettent le film au diapason, lui conférant une aura de tristesse et de mélancolie. Avec son film, Norman effectue une opération : il libère le blues de l’agressivité qui l’habite. Pour ce faire, le réalisateur se sert de l’union d’un homme noir et d’une femme blanche. Cela n’a rien à voir avec la pornographie, Norman ne pouvait pas choisir d’autres images, elles sont légitimes de bout en bout. Car seule cette radicalité permettait de faire comprendre que même l’union de deux personnes ne peut pas supprimer le fossé entre les races, qui est d’ordre social et politique. Blues People doit inévitablement devenir un film d’agitation. Mais l’appel à l’action est formulé avec une force lyrique et une sensibilité extrêmes. »
Hans Günter Pflaum, cité par Gerd Conradt, mars 1969